Maxime Sorel face NORD
Dimanche, le skipper du voilier V and B – Monbana – Mayenne prendra le départ de The Transat CIC, théâtre du début d’une saison XXL ponctuée par le Vendée Globe. Le marin, originaire de Cancale, s’apprête à vivre une traversée de l’Atlantique Nord virile entre Lorient et New York, successions de dépressions et vent de face au programme. Parmi les premiers voiliers IMOCA mis à l’eau cette année, V and B – Monbana – Mayenne est totalement fiabilisé et optimisé pour la compétition en solitaire et a déjà enchaîné depuis mars quelques belles navigations « test » afin de s’échauffer et entrer dès la fin de semaine dans le vif du sujet. Entretien
1) Comment s’est déroulée ta préparation pour cette deuxième participation à The Transat CIC ?
Notre chantier hivernal a duré deux mois à Concarneau. Nous avons mis à l’eau mi-mars et depuis j’ai enchaîné 4 véritables longues navigations de 24 heures, dont 2 en faux solo. C’était bien. Il ne fallait pas moins. Cela aurait été compliqué d’avoir moins de temps de préparation. Au-delà de The Transat CIC, nous avions en tête lors de ces navigations, le Vendée Globe et nous avions pas mal de tests à faire. Cet hiver, nous avons changé quelques pièces usées par exemple comme les paliers de safrans ou des billes de chariot. Il fallait forcer dessus en condition afin de voir si tout était en ordre de marche. Nous avons eu quelques surprises, mais mon équipe a bien travaillé et nous avons une capacité d’adaptation technique forte. V and B – Monbana – Mayenne est un voilier très pointu et technologique. Nous sommes dans de la mécanique de précision. J’ai évidemment aussi profité de ces entraînements pour me remettre physiquement et mentalement dans mon voilier, retrouver mes automatismes… D’habitude, nous préparons les transats plutôt en été ou en début d’automne dans des situations météo assez légères. Là, j’ai eu de la mer et de l’air.
2) Quelques mots sur le parcours de l’épreuve entre Lorient et New York ?
Il n’y a pas de marque de parcours entre Lorient et New York. Sur le papier, New York est quasi en face de Lorient, mais on ne pourra pas aller tout droit ! Nous allons avoir une énorme zone des glaces à respecter qui va nous contraindre un peu comme dans les mers du Sud sur un Vendée Globe à passer dans des couloirs entre une dépression et cette zone interdite. Nous ne pourrons pas faire trop d’Ouest. La direction de course va également nous indiquer des zones interdites pour cause de cétacés. Bref, il y aura quelques obstacles dans ce parcours. Autre paramètre et pas des moindres, nous devrons composer possiblement avec les forts courants du Gulf Stream* qui peuvent aller jusqu’à 4 à 5 nœuds et qui peuvent engendrer une mer dégueulasse surtout si nous sommes au près. En montagne, on ne s’attaque pas souvent au versant Nord, là nous n’aurons pas le choix même si une route Sud est possible, mais rallonge fortement les distances au but. En 2016, Gilles Lamiré en Multi50 avait flirté avec les Açores…
3) Quelles sont tes ambitions sur cette navigation qui devrait durer 8 jours et être particulièrement intense ?
Si je fais un top 5 c’est ouf alors c’est ce que je me donne comme objectif. En même temps, il va falloir continuellement trouver le bon compromis, car l’idée est de ne pas casser et entacher le programme à suivre. Nous avons une autre transat ensuite avec la New York – Vendée et puis il y aura mon deuxième Tour du Monde qui est clairement l’ambition principale de l’année. J’ajoute également qu’en prenant le départ de The Transat CIC, je serai qualifié pour le Vendée Globe.
4) 33 skippers – solitaires au départ, qui sont tes adversaires directs ?
Ils sont tous mes adversaires, mais je dois dire que j’aimerais, un peu comme lors de mes dernières transats, me retrouver avec les voiliers de Boris Herrmann, Samantha Davies, Paul Meilhat et Yannick Bestaven. Je ne me priverai pas non plus de jouer si c’est possible avec les favoris que sont Jérémie Beyou, Charlie Dalin et Yoann Richomme.
5) Si on te dit The Transat, tu dis quoi ?
Je dis face Nord. Le parcours parle par lui-même. Dans les faits, ce n’est pas si simple de se mettre dans la course. D’habitude, nous avons un plus gros convoyage de Concarneau pour rejoindre Le Havre ou Saint-Malo. Là nous avons mis 3 heures pour rallier Lorient. Ces convoyages sont souvent un bon dernier training de concentration. Et puis là nous sommes à Lorient. J’ai mes repères. J’ai un peu de mal à me dire que nous allons aller au charbon !
* Le Gulf Stream est un courant océanique chaud de surface prenant sa source entre la Floride et les Bahamas, le long de la côte est des États-Unis et qui se disperse dans l’océan Atlantique quelque part au large de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve tout en se prolongeant par d’autres courants marins. Il constitue une portion du gyre de l’Atlantique Nord et désigne souvent dans le langage courant et celui des médias la dérive nord atlantique qui baigne les eaux de l’Europe de l’Ouest et du Nord.